Il fut un temps où Adrien Houngbédji était une institution. Un maître du barreau, un chef de parti respecté, un leader politique de premier plan. Aujourd’hui, il ressemble plus à un brocanteur de la scène politique béninoise. Un habile commerçant, vendant tour à tour son logo, ses militants, et même ses principes, selon la tendance du marché électoral.
On pourrait le surnommer “Maître Tchoco Tchoco”, non plus pour son charisme, mais pour son inébranlable talent de négociateur en coulisses. C’est simple, chez lui, tout se monnaie : une position sur une liste électorale, un soutien politique, une indignation feinte… Il paraît même qu’un certain Olivier Boko pourrait témoigner, après cette fameuse affaire où trois noms sur la liste du Moele auraient été troqués contre une somme rondelette en 2019. Qui dit mieux ?
Le Prédicateur de l’union… et de la division
L’ancien patron du PRD avait pourtant tout pour finir en sage de la République. Mais il semblerait qu’à force de trop jouer avec le vent, il ait fini par en perdre le nord. Dissous dans l’Union Progressiste le Renouveau (UP-R) comme un sucre dans une tasse de café trop chaude, son ex-parti n’existe plus, du moins officiellement. Et pourtant, le voilà qui rassemble ses fidèles orphelins pour leur glisser un discours empoisonné.
Ah, Maître Houngbédji… Lors de cette cérémonie de vœux, il aurait pu prêcher la paix, vanter l’unité, saluer les avancées qu’il a contribué à mettre en place. Mais non ! Il a préféré se lancer dans une envolée lyrique contre Patrice Talon, qu’il encensait encore il y a peu. La politique, ce n’est plus l’art de convaincre, mais celui de retourner sa veste avec élégance.
Première bourde : il s’en prend au président derrière son dos, comme un commis voyageur de la rancune. Pourtant, Talon était encore chez lui récemment, et pas un mot n’a filtré de cette rencontre. Qu’a-t-il donc fait de son célèbre flair d’avocat ? Il sait bien que l’homme de la Marina n’apprécie guère ces petites trahisons de fin de mandat.
Deuxième bourde : il ose qualifier Olivier Boko de victime. Oui, oui, un homme condamné par la justice devient soudainement un martyr ! Quand on est un grand juriste comme Houngbédji, on devrait pourtant savoir que la justice, ce n’est pas un jeu de dés, et qu’un jugement, ça se respecte… sauf, bien sûr, si on cherche à jouer les chevaliers blancs d’une cause à géométrie variable.
Troisième bourde : il laisse entendre que l’exclusion politique serait la cause de la tentative de coup d’État. Rien que ça ! Autrement dit, il justifie à demi-mot l’indéfendable. Ce n’est plus de la politique, c’est de l’acrobatie !
Enfin, la plus grande perle : il suggère que le président Talon devrait gracier certains détenus, sans même prendre la peine d’adopter la posture adéquate. Talon, lui, n’a jamais aimé le chantage. Ce n’est pas en lançant des piques à la cantonade qu’il obtiendra quoi que ce soit.
Le ternier tour de magie du patriarche
Adrien Houngbédji aurait pu entrer dans l’histoire comme un bâtisseur. Mais il a choisi un autre destin : celui du vétéran politique en quête de reconnaissance tardive auprès d’une opposition qui l’a pourtant conspué pendant des années.
Le voir aujourd’hui courtisé par certains proches du parti Les Démocrates, c’est un retournement de situation digne d’un roman burlesque. Le Secrétaire Général à la communication des Démocrates est carrément devenu son attaché de presse. Ça partage, ça partage, comme on dit !
Mais ne nous y trompons pas : derrière cette comédie, il n’y a qu’un jeu bien connu. Le même qui consiste à flairer la direction du vent pour s’y engouffrer, à attendre la veille des élections pour redéfinir ses “convictions”, et à espérer que la jeunesse accepte encore et encore de subir les manigances des vieux crocodiles de la politique.
Mais cette fois, peut-être que le vent a tourné pour de bon. Peut-être que la réforme du système partisan, aussi imparfaite soit-elle, commence à porter ses fruits. Peut-être que ce bal des opportunistes touche à sa fin.
En attendant, Maître Houngbédji continue son petit commerce. Après tout, qui sait combien coûtera le prochain logo qu’il vendra au plus offrant ?
C’est fini !